Laurent Dubos
Consultant – Psychologue du Travail et des Organisations | RH Partners Bordeaux
Depuis plus de 30 ans, Laurent Dubos est consultant Psychologue du Travail et des Organisations chez RH Partners à Bordeaux. Directeur des activités de conseil en Management, il intervient auprès de grandes Entreprises où il est reconnu pour combiner une approche de terrain avec des connaissances universitaires solides. Enseignant Référent du Ministère de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur pour l’Université de Bordeaux, il profite d’une expertise en Sciences Sociales qu’il met à disposition de ses clients. Il intervient depuis plus de 20 ans sur les questions de prévention de la santé mentale au travail.
Ses deux principaux domaines d’expertise au sein de RH Partners sont :
- Le conseil en management, incluant le coaching individuel et collectif, le team building, le co-développement, les formations managériales, l’animation de séminaires, et plus généralement l’accompagnement des transformations.
- Le conseil en prévention de la santé mentale au travail, avec la réalisation de diagnostics des risques psychosociaux (RPS), la formation à la prévention des RPS, les démarches de prévention et de promotion de la santé mentale au travail, les enquêtes sur le harcèlement, le coaching de médiation, et la mise en place de cellules d’écoute psychologique.
Fort de son expérience à Bordeaux, Paris et Toulouse, Laurent Dubos est reconnu pour son approche humaine et sa capacité à décrypter les enjeux complexes liés au bien-être au travail.
Le bien-être est indissociable du bien faire.
Interviewer : Pourquoi la santé mentale est-elle devenue un enjeu majeur dans le monde du travail actuel ?
Laurent Dubos :
Eh bien, au risque de paraître prosaïque, parce que ça coûte cher, très cher !
Saviez-vous que les troubles de santé mentale coûtent plusieurs milliards chaque année aux entreprises ? Cette prise de conscience découle de plusieurs évolutions majeures. Les transformations économiques, sociales et technologiques ont radicalement changé notre façon de travailler. Aujourd’hui, nous faisons face à une intensification du travail, une pression constante pour la productivité, et une disponibilité permanente exacerbée par les outils numériques.
Le télétravail, notamment imposé par la crise sanitaire, a renforcé cet enjeu en ramenant le travail dans la sphère privée, créant parfois un isolement social. Parallèlement, les attentes des salariés évoluent : ils recherchent, davantage aujourd’hui que par le passé, un équilibre entre vie professionnelle et personnelle. La santé mentale est devenue un indicateur clé pour les entreprises, car un collaborateur en difficulté ne peut être performant. Heureusement, la stigmatisation diminue, et des initiatives comme les formations aux premiers secours en santé mentale (PSSM) marquent des avancées significatives.
Interviewer : Quelles sont, selon vous, les principales causes de la détérioration de la santé mentale dans le milieu professionnel aujourd’hui ?
Laurent Dubos :
La dégradation de la santé mentale résulte souvent d’un déséquilibre entre contraintes et ressources. Par exemple, le télétravail imposé, les open spaces ou encore des schémas organisationnels exagérément matriciels accentuent les contraintes sans offrir de soutien adapté. Parmi les facteurs les plus courants, on retrouve :
- Une surcharge de travail et des exigences élevées.
- Une culture de l’urgence et une difficulté à déconnecter.
- Un manque de soutien managérial.
- Une reconnaissance insuffisante des efforts.
- Des incertitudes liées aux crises économiques et géopolitiques.
- L’isolement social et les discriminations.
Des diagnostics de risques psychosociaux sont indispensables pour identifier ces causes et leurs conséquences. Et ces conséquences se situent à 3 niveaux :
- au plan individuel comme le stress, le burn-out, les addictions (jeux, psychotropes), l’addiction au travail, la baisse du sentiment d’efficacité professionnelle et de l’engagement organisationnel ;
- au plan collectif comme des violences physiques et verbales, l’agressivité, le harcèlement, les sabotages, ou la baisse de la citoyenneté organisationnelle ;
- et au plan organisationnel comme l’absentéisme, les accidents du travail, le turn-over, la baisse de la productivité, de la qualité et l’augmentation de l’intention de quitter.
Interviewer : Quel rôle les Services RH et les Managers doivent-ils jouer face à cette question ?
Laurent Dubos :
Les Services RH et les Managers sont les piliers d’une politique de santé mentale efficace. Ils doivent :
- Reconnaître publiquement l’importance de la santé mentale.
- Mettre en place des politiques de prévention.
- Créer une culture organisationnelle axée sur le soutien et la reconnaissance.
- Former et sensibiliser à la santé mentale.
- Encourager un équilibre entre vie personnelle et professionnelle.
- Proposer des espaces d’écoute, des cellules de soutien et des médiations.
L’idée clé est d’instaurer une politique du « Tous Préventeurs », comme l’ont écrit Sonia Laberon et Christine Lagabrielle dans leur ouvrage Santé au travail et risques psychosociaux : Tous préventeurs ? (janvier 2015), où chaque acteur de l’entreprise devient un maillon actif pour préserver le bien-être collectif et la santé mentale des individus.
Opposer santé mentale au travail et performance sociale et économique est une véritable transformation culturelle à opérer et les Services RH, comme les Managers ont un rôle central à jouer ici.
Interviewer : Quelles solutions, outils ou techniques conseillez-vous aux Services RH et Managers pour prévenir les risques psychosociaux ?
Laurent Dubos :
La formation reste la pierre angulaire de la prévention. Des diagnostics réguliers, des outils de repérage des situations à risque, des mécanismes de veille pour faire remonter les informations, ainsi que des espaces de régulation sont également essentiels. Ces outils permettent non seulement de détecter les risques, mais de mettre en œuvre de véritables actions de prévention, qui, au-delà d’instaurer un climat de confiance et d’ouverture, permettent d’assurer le niveau de performance des Organisations.
Interviewer : Quelles solutions recommandez-vous aux salariés pour gérer leur stress ?
Laurent Dubos :
Les salariés doivent apprendre à mieux gérer leur relation avec les outils numériques, par exemple en désactivant les notifications et en favorisant des moments de déconnexion.
Varier ses activités, pratiquer une activité sportive ou simplement marcher sont d’excellents moyens d’améliorer sa santé mentale.
Enfin, il est crucial de parler de ses difficultés et de ne pas hésiter à consulter un professionnel en cas de besoin. Le soutien social reste aussi une ressource clé.
Interviewer : En tant que psychologue du travail et coach, comment votre formation influence-t-elle vos interventions ?
Laurent Dubos :
Mes interventions se situent à deux niveaux :
- le premier consiste à intervenir auprès des organisations en les conseillant sur leur politique de santé mentale au travail. Ici, ma formation de Psychologue du Travail me permet de les conseiller sur :
- les mécanismes de prévention primaires (les rôles et missions des acteurs, les processus de prise de décision, le management, la conception des postes, les espaces de dialogue),
- les actions de prévention secondaire qui visent à réduire les atteintes à la santé des individus en les aidant à mieux gérer les situations à risque (les formations à la prévention des RPS, la promotion de la QVCT, la gestion du stress et des situations de violence, par exemple, dans cette catégorie)
- et sur les instruments de prévention tertiaire (plutôt curatifs lorsque le dommage a eu lieu : le soutien psychologique, les réunions de discussion et d’échanges pour mieux gérer les conflits, l’adaptation des postes de travail en lien avec l’inaptitude).
- Ma formation de Psychologue me permet aussi d’intervenir directement auprès des acteurs dont l’état de santé mentale est défaillant pour leur permettre de recouvrer un niveau satisfaisant.
Interviewer : Les entreprises ont-elles intérêt à investir dans la santé mentale si elles veulent être rentables ?
Laurent Dubos :
Absolument. Les troubles de santé mentale engendrent des coûts considérables, notamment en termes d’absentéisme et de turnover. J’ai travaillé avec une entreprise où le turnover, initialement à 57 % pour une catégorie du personnel, est tombé à 19 % en trois ans grâce à des initiatives ciblées. Investir dans la santé mentale n’est pas seulement une obligation morale, c’est une stratégie économique judicieuse.
Interviewer : Comment mesurer l’impact des initiatives de santé mentale ?
Laurent Dubos :
Les résultats se traduisent par une baisse des conflits, des burn-out et de l’absentéisme, mais aussi par une augmentation de l’engagement et de la satisfaction des collaborateurs. Des indicateurs comme le turnover ou la santé globale des employés permettent de quantifier les effets positifs. Une culture d’entreprise centrée sur la promotion de la santé mentale au travail devient un avantage concurrentiel.